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Congrès Photovoltaique Suisse 23.3.2017
Tournant énergétique, photovoltaique et politique (version proviroire)
Il y a 10 ans jour
pour jour, le Parlement Suisse approuvait la loi sur
l’approvisionnement en électricité. Dans ce paquet législatif,
il y avait aussi une modification de la loi sur l’énergie, qui établissait
pour la première fois la RPC. C’était le 23 mars 2007. Dans la version de
l’époque, cette loi imposait d’invraisemblables
restrictions pour le solaire. En particulier, elle limitait la
part du photovoltaïque à la RPC à 5% des moyens financiers aussi
longtemps que les coûts du KWh solaire dépassaient 60 centimes,
puis instaurait des paliers intermédiaires jusqu’à 40 centimes. Au moment de décider
de la loi, le photovoltaïque coutait environ Fr. 1 par KWh. La puissance installée
à fin 2006 était d’environ 30 MW, et le solaire couvrait 0,05%
de la production Si mon prédécesseur
Yves Christen et moi avions pu obtenir ce compromis de haute lutte,
c’est parce que les conservateurs étaient sûr et certains que
jamais les coûts du photovoltaïque ne baisseraient suffisamment
pour obtenir plus de 5% des moyens de la RPC. Autant dire que si je
leur avait dit que 9 ans plus tard, Bertrand Piccard ferait un tour
du monde en avion solaire, ils m’auraient pris pour un martien
tout vert directement sorti d’une soucoupe volante…
D’ailleurs, nos opposants de l’époque étaient sûr de nous
avoir roulé dans la farine… Mais ce qui leur
aurait paru encore plus invraisemblable, c’est si je leur avais prédit
que la production photovoltaïque Suisse se serait multipliée par
70 en 10 ans. Désormais, les installation photovoltaïque en
service à fin 2016 produiront en 2017 3 % de l’électricité
Suisse, soit bientôt l’équivalent de la centrale nucléaire de Mühleberg.
J’aurais aimé vous
exprimer ce chiffre en pourcentage de la production de beznau
1, mais les mathématiques interdisent la division par zéro. Evidemment, les
conservateurs n’avait pas vu l’évolution de la production
mondiale qui est désormais de 360 TWh, ce qui correspond à
40 fois a centrale nucléaire de Leibstadt. À l’époque, il était
visionnaire, pour ne pas dire farfelu, de considérer que le
photovoltaïque pourrait apporter une contribution substantielle à
l’approvisionnement électrique. Et la loi que nous
avions adoptée était un mélange d’accélérateur et de frein. Un accélérateur
parce qu’elle instituait enfin un système de rachat. Et un frein,
parce qu’elle a relégué le photovoltaïque à l’arrière de la
liste d’attente, ce qui nous pénalise encore aujourd’hui, 10
ans plus tard, alors même que désormais, le photovoltaïque est la
façon la moins chère d’obtenir un nouveau kilowattheure d’électricité
en Suisse. Mais sans cette loi,
il est évident que nous n’aurions pas atteint 3 % d’électricité
solaire en Suisse en 2017. Entre-temps, la
vision développée par Swissolar s’est avérée très réaliste.
Lorsqu’on 2011, au congrès photovoltaïque, nous avions proposé
20 % d’électricité solaire en Suisse en 2025 soit la moitié du
remplacement du nucléaire, nous passions pour des extrémistes sous
le coup de l’émotion consécutive à la catastrophe de Fukushima. Pourtant, quelques
semaines plus tard, le Conseil fédéral se rallie à cet objectif.
Mais seulement à l’horizon 2050, soit beaucoup trop tard. Et sur
la base d’études complètement dépassées qui prévoyaient pour
2030 a pris du photovoltaïque largement supérieur à celui que
nous avons déjà atteint aujourd’hui. Entre-temps, il
apparaît plus en plus clairement que le photovoltaïque apportera
plus la moitié du remplacement du courant nucléaire. Et surtout, nous
observons une synergie avec d’autres évolutions technologiques.
Ce qui se dessine désormais, c’est que le solaire photovoltaïque
ne contribuera pas seulement au remplacement du nucléaire, mais
peut-être encore davantage, dans une phase ultérieure, à la déscarbonisations
de l’entier notre système énergétique. Plusieurs progrès
majeurs concourent à cela : ·
il y a évidemment le développement des batteries, sous
l’influence très importante des constructeurs de voitures électriques.
Ici aussi, je crois que les opposants au compromis de 2007
n’auraient jamais cru un seul instant que 10 ans plus tard, on
observerait un engouement du grand public pour des voitures électriques
avec une autonomie de 300 ou 400 km. ·
Autre progrès majeur, le développement de l’électronique et des
technologies de l’information permettent un accroissement de
l’efficacité dans l’usage de l’électricité et dans le
management de l’approvisionnement électrique, en particulier au
niveau des réseaux. ·
Les progrès faits par les pompes à chaleur sont tout aussi
remarquables. Alors qu’elles avaient tendance à se transformer en
chauffage électrique direct lorsqu’il faisait froid, elles ont désormais
énormément progressé, comme d’ailleurs toute la technologie du
bâtiment. Tout cela concourt grandement à une tendance à l’électrification. ·
Le plus étonnant, c’est que ces dernières années, la
consommation globale d’électricité en Suisse et en Europe
stabilisée, malgré, pour la Suisse, une forte croissance démographique
économique. Cela reflète les progrès d’efficacité. ·
Enfin, on pressent une percée dans le stockage à longue durée
d’électricité, par le biais de la transformation de l’électricité
en méthane ou en en hydrogène. Cela permet d’autres usage, et même
la rétro transformation ultérieure de cet éco-gaz en électricité.
Vu la taille des réseaux de gaz, il est possible de stocker ainsi
l’énergie sur de longues durée. La technologie est en pleine
progression. La baisse des prix du courant renouvelable, et en
particulier des surplus, laisse entrevoir des perspectives économiques
à fait intéressant pour ces technologies. Et comme elles sont
indispensable dans de très nombreux pays, les projets avancent
rapidement La technologie qui
nous occupe aujourd’hui, le photovoltaïque, est véritablement la
clé de voûte de cette évolution, grâce à sa particularité
absolument géniale qui consiste à transformer directement le
rayonnement du soleil en électricité. L’idée est d’ailleurs
tellement géniale qu’entre-temps, on fait aussi l’inverse :
pour s’éclairer au transforme directement l’électricité en
lumière avec les LED. Lux fiat, pourrait-on
dire. La dynamique
technologique et économique des transformations du système
d’approvisionnement énergétique est très forte. Mais ne nous faisons
pas d’illusions : les déterminants de l’énergie, ce ne sont
pas que de la technique et le savoir, mais aussi des
infrastructures et du pouvoir. Il y a bien certains éléments de
marché, mais on ne saurait comparer ce secteur avec le marché de
la chaussure, de l’électronique de loisirs ou des vacances. En raison de
l’ampleur des investissements et des durées d’amortissement,
mais aussi de l’influence des nombreuses régulations de
l’inertie propre au domaine des infrastructures, la politique a nécessairement
une influence. Espérer une transformation du système énergétique
sans accompagnement politique est totalement naïf, ne serait-ce que
parce que les tenants des anciennes technologies ne vont pas hésiter
un seul instant à utiliser tous leurs leviers de lobbying. On sait
que dans certains pays cela va jusqu’à l’engagement de la force
militaire nationale en dehors des frontières, comme le montre les
nombreux conflits militaires liés à l’énergie. Cette influence de la
politique s’explique également par une raison toute simple :
disposer de suffisamment d’énergie est un facteur absolument
stratégique pour chaque pays. ----------------- Pour que l’évolution
aille dans le bon sens, il faut trouver le bon emboîtement entre
l’évolution de la technologie, les conditions économiques et les
décisions politiques. Pour cela, la
politique doit poser le cadre. Mais la politique n’est pas un deus
ex machina qui qui déciderait tout de manière parfaite. La
politique est malléable. Elle est le reflet des préférences, des
idées des concepts et des intérêts en présence. Tout cela évolue
heureusement, et en particulier les intérêts eux-mêmes sont
malléables au fil de du temps. On le voit par
exemple en regardant l’évolution de la branche électrique
Suisse, qui était allergique à l’idée d’une sortie du nucléaire
et d’un passage un approvisionnement entièrement renouvelable,
mais dans l’attitude a heureusement fondamentalement évolué ce
dont je me réjouis, mon cher Michael. En réalité,
la politique ressemble à la technologie : elle progresse. Un moment
donné, certaines choses sont impossibles, mais deviennent possible
plus tard, et l’inverse est aussi vrai (enfin en politique, en
principe pas pour la technologie). L’évolution de la
législation sur les énergies renouvelables au cours des 10 dernières
années montre la capacité d’adaptation de la politique : la RPC
a été développée au cours de plusieurs révisions législatives.
Les montants à disposition ont été augmentés, le principe de
l’autoconsommation a été introduit, et en 2014, le principe de
la rétribution unique a constitué une percée majeure. Elle nous a
d’ailleurs même bousculé nous. Nombre d’entre vous n’y
croyaient pas trop à l’époque. Tout cela a porté ses fruits . Comme les étapes précédentes,
la stratégie énergétique 2050, qui constitue la prochaine étape,
est un compromis. J’entends les critiques : La stratégie énergétique
n’irait pas assez loin, n’irait pas assez vite. Elle ne ferme
pas assez rapidement les centrales nucléaires. Elle ne développe
pas assez l’énergie solaire. Ou ne la soutient pas assez ou pas
assez vite. Tous ces reproches
sont compréhensibles. Mais ils méconnaissent trois choses. Premièrement, un bon
compromis politique ne satisfait par essence personne complètement.
C’est un arbitrage entre différents intérêts et différentes
conception. Par exemple : nous aurions bien sûr préféré
disposer des 0.2 centimes destinés à l’hydroélectricité pour développer
le solaire. Mais il est légitime d’éviter que l’hydroélectricité
fasse faillite. D’ailleurs il y a une synergie étroite entre le
photovoltaïque et l’hydroélectricité pour sécuriser
l’approvisionnement. Donc oui, il faut partager composer. C’est justement
parce que ce paquet a respecté ses équilibres qu’il a une véritable
chance politique. Deuxièmement, la
politique ne s’arrête pas le 21 mai 2017, pas plus que l’évolution
technologique. Si nous gagnons cette votation, nous pourrons
envisager de prochaines étapes. Troisièmement, la
vocation de la Confédération n’est pas de materner l’énergie
photovoltaïque. En réalité, la situation complètement inverse :
c’est le photovoltaïque qui a beaucoup à apporter à la Suisse.
Il est donc logique que la Confédération attende au
contraire du photovoltaïque une belle performance. Performance que
le photovoltaïque a d’ailleurs accompli malgré les circonstances
difficiles. Mesdames et
Messieurs, quelle autre technologie est parvenue, en quelques années,
atteindre 3 % de l’approvisionnement national en électricité ? Évidemment, la Confédération
aussi comprendre que ces attentes seront déçues si elle nous met
les bâtons dans les roues. La branche photovoltaïque
n’apporte pas seulement de l’énergie électrique, mais aussi
l’énergie politique. Elle est le moteur de la stratégie énergétique.
La branche photovoltaïque
est aussi une force de transformation sociale et économique.
C’est une force de décentralisation et de modernisation, une
force qui libère de nos dépendances à l’importation. Il faut donc
une bonne politique, et si je vous raconte cela, c’est parce que
finalement la politique, c’est désormais vous qui allez la faire.
En effet, après un long voyage institutionnel de la SE2050, vous
allez, comme citoyennes comme citoyen, vous prononcez le 21 mai
2017. Le gouvernement et le
parlement, autrement dit les élus politique, ont pris leurs
responsabilités. En présentant un premier projet, en le modifiant
puis en l’adoptant. Maintenant, c’est
à vous de prendre vos responsabilités, en vous engageant à fond
dans la campagne. La bataille du 21 mai
est loin d’être gagnée. J’étais mardi soir à Zurich pour un
débat contre Christophe Blocher. Je peux vous dire qu’il était
encore bien vif et déterminé à gagner, ne reculant devant aucun
amalgame ni aucune proposition démagogique. Pour vous dire, il
s’est vanté d’avoir, il y a 30 ans, était le premier à ne
plus croire l’énergie nucléaire en organisant l’enterrement de
première classe de la centrale nucléaire de kaiseraugst.
Argumenter de la sorte est d’une rare mauvaise foi lorsqu’on
veut torpiller le tournant énergétique . Et Il a juste omis de préciser
que ses funérailles de Kaiseraugst avaient coûté 350 millions de
francs à la caisse fédérale. A propos de caisse, le
connaissant, j’imagine qu’il ne reculera pas non plus à l’idée
d’ouvrir son porte-monnaie, que nous savons bien garni, pour faire
campagne contre la Stratégie énergétique. Mais c’est lundi
soir que j’ai vu comment gagnerons. J’étais à Chenens, dans le
canton de Fribourg, à une assemblée du collectif RPC pour la sécurité
d’investissement dans le solaire. C’est une association
d’agriculteurs et d’artisans décidés à s’engager sur le
terrain pour faire campagne. Ils se sont rués sur les banderoles
que nous avions préparées. J’ai réussi à en sauver deux que je
vais vous montrer à l’instant. Nous gagnerons cette
votation, grâce à notre engagement sur le terrain. C’est la top
priorité des 2 prochains mois. Merci.
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Contact: Roger Nordmann, Rue de l'Ale 25, 1003 Lausanne, Twitter @NordmannRoger 1.04.2017 |